ELUCUBRATION
Amère criste-marine
Triste topique
Qui crispe la narine
Quand on piétine le sable aride
Amarres raides
Semis de samares anodines
Sur plages toniques
Tropiques en crise
Vent de folie crimes en série.
ANDREE CHEDID
Ecrit de femme. La force et de la délicatesse d' Andrée Chedid, que je sens si proche encore.
Multiple
Je fonce vers l'horizon
Qui s'écarte
Je m'empare du temps
Qui me fuit
J'épouse mes visages
D'enfance
J'adopte mes corps
D'aujourd'hui
Je me grave
dans mes turbulences
Je pénètre
Mes embellies
Je suis multiple
Je ne suis personne
Je suis d'ailleurs
Je suis d'ici
Sans me hâter
Je m'acclimate
A l'immanence
De la nuit.
Andrée Chedid "Rythmes" Gallimard
FEMMES SUITE
Journée de la femme…suite. Je sais que je suis dure, mais il y a des questions sur lesquelles j’ai besoin de réfléchir, le dire, poser des questions.
C’est rare que chez la femme
(Je veux dire l’ordinaire, comme moi)
On salue l’homme
(Je veux dire l’être humain, comme nous tous).
On honore la mère, la nourricière,
Celle qui transmet la vie.
Et les autres qui, pour quelque raison, peu importe
N’ont pas d’enfants ?
Sont-elles des ectoplasmes, des sous-humains,
Des non-humains ?
Glaçant.
Que devenons-nous quand les oiseaux ont quitté le nid ?
De belles grands-mères, et d’arrières.
Les autres, où est leur place ?
"FEMMES"
Norlane Deliz nous propose d'écrire des haïkus en hommage aux femmes. En voici deux:
Voilées violées
Méprisées, exploitées – tuées !
En voie d’extinction ?
Fantasques généreuses
Infinies sensibilités –
N'avoir plus peur.
MARS 2011 2
Rondeau de printemps (rien à voir avec rouleau de printemps)
Quand le bel endormi s’éveille,
Soucis, jonquilles et pâquerettes,
Prunus, capiteuses violettes
Ouvrent des yeux qui m’émerveillent.
Les frais pissenlits font salade
Les oiseaux chantent sur la treille.
Dès que l’endormi se réveille
La muse incite à la balade.
Mais que cet endormi s’éveille
Et les poules nuit et jour caquètent,
L’herbe pousse, les tondeuses hoquètent,
Les tracteurs font fuir le poète.
Ciel, le bel endormi s’éveille !
POUR LES RESTOS DU COEUR
poème pour restos du coeur
S’il faut que pied à terre
Même jamais voyagé
Même jamais navigué
Il faut que pied à terre
D’un grand coup de talon
Tout l’univers en tremble
Tout l’univers en transe
Combler un vide
Courant de compassions
Un toit du pain cœur plein
D’un grand coup de talon
Pour s’envoyer en l’air -
Faire la nique au patrons.
RENE DE OBALDIA
Pourquoi donc est-ce un homme qui décrit aussi bien mon homme idéal ?
Cherche un homme qui n’existe pas
Beau
Mais pas trop.
Doux et rude
Paillard bien que prude
Religieux et mécréant
Peau de vache et bon enfant
Fleurant le soufre et la lavande
Végétarien aimant la viande.
Voyageur et casanier
Désinvolte et cavalier :
A toutes les heures qui sonnent
S’occupant de ma personne
Aux grands, aux petits soins
Surtout quand j’ai le rhume des foins.
Me procurant belle aisance
Sans éprouver de repentance
Point jaloux de mes soupirants
Allons plus loin : de mes amants
Tant il bénit mon existence !
Faisant semblant d’être ailleurs
Quand il m’attend chez le coiffeur.
M’amenant toujours au théâtre
Quand c’est Antoine et Cléopâtre.
Toujours chic, même débraillé
Même complètement déshabillé
Froid
Comme saint Eloi
Chaud
Quand il le faut.
Prônant le pour et son contraire
Trois mailles à l’endroit trois mailles à l’envers
N’importe quoi pour me plaire
Bon. De ce pas
Je vais aller me promener au Bois
Si quelquefois…quelquefois
Je rencontre un homme qui n’existe pas.
René de Obaldia « Fantasmes de demoiselles » chez Grasset
MEDITATION 7
Etat de vibration sensible,
Calme vivant, offrant rencontre intime
Avec l’objet choisi.
MARS 2011 1
Ce matin au levant
Dans la nuit encore sombre
Et la Lune et Vénus
Dessinaient dans le ciel
Comme un encouragement
Aux peuples révoltés.