DEFI 80: QUELQUE PART UN BLOG PAS COMME LES AUTRES...
Ce blog existe, chère Enriqueta, et je l'ai rencontré ici. Grâce à lui, j'ai écrit ce texte, bien obligée de jongler avec beaucoup d'éléments aléatoires.
"Imploration de la mouche ou le dernier haïku."
Lorsque je repris conscience, le spectacle commençait. La musique me parvenait comme un lointain écho. Je distinguais à travers l’étroite fenêtre, percée dans la muraille, trois acteurs dont un roi agenouillé, armé d’un poignard, menaçant un aède qui refusait de lui révéler les pas de la Danse sacrée de la Connaissance. Et de lui révéler le Chant. Celui du coquillage ouvert comme une blessure, celui de l’oiseau envolé dans les nues, et le contre-chant du grillon embarqué au creux des navires.
Ce chant aurait dû replacer la Lune dans le ciel, Lune que le roi avait dérobée pour l’accrocher à l’encolure de son cheval.
Le décor invitait à l’évasion. Je me souvins qu’en rentrant, hier, chez moi, j’étais passée devant une vitrine d’antiquaire. Une petite photo d’une lithographie de Daumier y était exposée. Je pensai que Nadar était peut-être en train de photographier les dernières fleurs d’automne avant la plongée dans la profondeur de la nuit hivernale.
Après la vitrine, une trouée dans une vieille maçonnerie de briques laissait entrevoir les ruines d’une fabrique d’instruments de musique japonais, qui avait brûlé récemment. Les pompiers étaient encore sur place, essayant de sauver le travail du compositeur Iro Miyoko, un opéra nommé « Imploration de la mouche ou le dernier haïku ».
Quel rapport pouvait-il y avoir entre le spectacle que je regardais frauduleusement en ce moment, et la destruction d’une œuvre d’art japonaise ? Hiroshima, le tsunami, la menace nucléaire? Je sentais là, intuitivement, un lien. Et j’étais sûre qu’il n’y aurait jamais de dernier haïku.